Les gonds ne vous résistèrent pas lorsque vous ouvrez la boite. Encore graissés à la perfection, ils s'ouvrent sans un bruit et, le couvercle enfin ouvert révèle un petit carnet de cuir intact, protégé pendant toutes ces années des périls du temps. Vous vous en emparez prudemment, comme si le carnet pouvait vous brûler, ou se désagréger au moment même où vous le touchiez.
Un petit sourire mi figue mi raisin se dessine sur vos lèvre lorsque vous remarquez votre bêtise : ce n'est qu'un carnet ! Vous commencez alors votre lecture.
Étude théologique d'une vie, chapitre III.
Je me réveille à l'aube. Les insectes attirés par mon feu sont manifestement partis lorsque les bûches sont devenues cendres. Depuis combien de temps suis-je partit ? Où en suis-je de mon périple ? Je n'ai aucune réponse pour ces questions, obsédé que je suis par d'autres beaucoup plus importante pour moi. Depuis combien de temps suis-je revenu ? Et là encore, aucune réponse ne me viens à l'esprit. J'ai vu les gens autour de moi vieillir, puis mourir. Pourquoi ne puis-je pas moi aussi bénéficier de ce repos ? Ou peut-être suis-je déjà mort, condamné non à l'enfer ou au paradis, mais à l’errance éternelle sur ces terres que je connais depuis bien longtemps, mais que je suis incapable de reconnaître. On dit que le royaume de Rushu est l'ultime punition, mais le démon a réussit à me faire bien pire. Je n'ai que trop de temps, et le seul loisir que j'ai pour le combler est de réfléchir sans cesse à ces questions, dont les seuls réponses m'apportent encore plus de questions. Un cercle vicieux sans fin que sont ces réflexions, comme ma "vie"...
Voilà plusieurs jours que je marche, et Tainéla me semble toujours aussi loin. Ce matin j'ai remarqué que les feuilles ont cessé de tomber, remplacées par les flocons de neiges. La pluie s'est arrêtée, mais les plaques de verglas rendent difficile mon trajet. Le monde à donc enfilé encore une fois son manteau blanc. Je n'ai pas mangé depuis quelques temps, et la faim se fait ressentir. J'ai fini mes tranches de viande séchées il y a trois jours je crois, et il temps pour moi d'aller chercher de quoi me nourrir. L'option la plus évidente qui se présente à moi est d'aller en ville en acheter, mais je n'ai pas d'argent, et la seule ville est à plusieurs jours de marche de là où je me trouve. Tainéla sera donc ma seule escale. Je doit donc chasser, mais avec mon épée de boisaille c'est impossible, d'autant plus qu'elle est émoussée, juste bonne à briser les quelques branches qui gênent parfois mon chemin, sans les couper évidemment. Ma dague est inutilisable aussi, je ne suis pas doué dans le lancé de couteau, et je ne pourrai pas approcher suffisamment pour m'en servir. Non, je vais devoir me fabriquer une arme.
Je m'enfonce alors dans la foret en quête d'une branche suffisamment longue et solide, mais qui n'offre pas trop de résistance pour que je puisse la tailler facilement. Du noisetier ferait parfaitement l'affaire. La saison hivernale ne permet pas de me déplacer rapidement dans cette profondeur de neige et de regarder ce qui se cache en dessous, mais offre deux avantages :
je peut casser les branches des arbres plus facilement, et les traces des animaux qui n'hibernent pas sont facilement repérable.
Je trouve une branche de noisetier parfaite : bien droite, et environ un mètre de long. Je retourne alors vers mon campement. Je marche sur mes traces, la neige en est déjà écartée, et mon retour n'en est que simplifié.
J'ai bien fait d'accrocher mon bouclier au dessus du feu, les braises n'ont pas été éteintes par la neige. Elles me fourniront un peu de chaleur le temps que je rende ma lance utilisable.
Je m'assied donc à côté des restes du feu et commence mon travail. Ma dague m'est bien utile finalement, mais tandis que je fini de tailler une pointe sur le bâton, elle y reste plantée. Je ne garde dans les mains que le manche, et le sang commence à couler de mon doigt. Une coupure, ça n'a jamais tué personne. De toute façon, ma lance me semble prête : elle est suffisamment pointue.
J'essuie ma main dans la neige et retourne alors dans la foret en quête de gibier, laissant derrière moi les reste de mon feu de camp et de la neige rouge.
Au bout de quelques minutes, je repère des traces dans la neige : un sanglier est passé par là.
Difficile de dire si les traces datent de moins d'une heure ou de deux jours, mais c'est la seule piste que j'ai. Je m'y élance sans trop réfléchir, ma lance à la main, et le reste de ma dague accrochée à ma ceinture.
C'est alors que le voit : gris comme le ciel et bien gras, il doit faire à peu près mon poids. Avec ses défenses, il est plus grand que ma lance.
La neige est moins épaisse ici, mais entrave toujours mes mouvements. Je ne pourrai donc pas m'en approcher discrètement comme je l’espérai. De toute façon, l’environnement lui même m'empêche d'être furtif : un clairière assez grande au centre de laquelle se trouve un petit lac. Il y a à peine cinq mètres entre le lac et la foret, et le sanglier est à une vingtaine de mètres de moi. La neige m'arrive un peu plus bas que les chevilles, je pourrai donc courir, mais pas aisément.
Je contourne ma proie tout en restant dans la foret jusqu'à être à porté. Je m'avance un peu, je suis à dix mètres de l'animal, je lève mon arme et la lance de toute mes forces sur ma cible.
La pointe s'enfonce facilement dans son flanc droit, le gras n'offre guère de résistance. Mais l'animal, affaibli, n'en est pas mort pour autant, et se dirige rapidement - et à ma grande fierté assez maladroitement - tête baissée sur moi.
Ses défenses jaunies en avant, je me rend compte soudain du danger. Avec sa vitesse, si je ne fait rien, c'est lui qui me tuera. Le sanglier perd beaucoup de sang, et sa chaleur, en plus de colorer la neige la fait fondre. Le sanglier charge toujours vers moi lorsque je dérape sur une plaque de verglas. Je tombe de tout mon poids sur le sol, heurtant du même coup un pierre : demain, si le sanglier ou le froid ne m'a pas tué, j'aurai un bel hématome à l'épaule.
La neige a un peu amorti ma chute, mais j'ai tout de même percuter violemment le sol. Le temps que je reprenne mes esprits, le sanglier est sur moi, en train de s'acharner avec ses défenses sur mon bras déjà meurtri. La bête complètement sur moi, je suis écrasé sous son poids. Je me protège comme je peut mon visage de mon bras valide, et me rappelle soudain que ma dague est toujours à ma ceinture. Elle est cassée, mais elle reste encore utilisable.
Vous tournez alors la page du carnet, mais elle semble collée à la suivante. Vous vous rendez compte que la nuit tombe alors et vous vous abritez dans la petite cahute du Lenald qui vous regardait toujours et vous faisant signe de le suivre. 
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